Suite de l’enquête QV2T – L’adaptation du monde du travail face à la 5e vague du Covid-19
février 2022
Alexandre Jost
À la mi-novembre, nous avons réalisé avec l’institut Think et Norstat France une seconde évaluation de la Qualité de Vie au Travail et au Télétravail des actifs français. Ce sondage révèle une meilleure adaptation des pratiques de travail en amont du rebond épidémique de cette fin d’année 2021. Après ces deux années difficiles, est-ce le signe que nous parvenons peu à peu à trouver notre équilibre ?
Un télétravail toujours convaincant pour ceux qui peuvent le pratiquer
En interrogeant de nouveau un échantillon de 1000 travailleurs venus de tous horizons*, nous apprenons que 5% des actifs français sont retournés en télétravail depuis le mois de septembre ! Très majoritairement, ceux-ci optent pour le télétravail à raison de 1 à 3 jours par semaine. L’hybridité est ainsi l’option la plus avantageuse, permettant de choisir son lieu de travail en fonction de sa mission du jour. Au total, 27% des actifs sont des télétravailleurs, exclusifs ou occasionnels, contre 22% en septembre. Néanmoins, il ne faut pas généraliser : le travail à distance est surtout répandu en Île-de-France, chez les cadres, les managers, les services aux entreprises, les grandes entreprises ou celles qui sont de taille intermédiaire. Cette hausse progressive de la pratique du télétravail ne concerne pas toute la société française mais seulement celle qui en a la possibilité. Un point intéressant : le retour au télétravail est surtout visible chez les jeunes et les plus de 55 ans, pour le confort et les nouvelles habitudes de vie qu’il procure.
Un indice de QV2T relativement stable depuis septembre : une forme d’acceptation ou de résignation ?
Plus généralement, après la rentrée de septembre et le retour massif en présentiel, nous pouvons observer en novembre de nombreuses améliorations auprès des travailleurs : -7 points sur l’anxiété et le stress (40% des interrogés), -5 points sur les problèmes liés au passe sanitaire (38%), -3 points sur les problèmes de sommeil (33%) et -3 points sur les problèmes liés au télétravail (28%). Remarquons que 58% des actifs sont opposés à l’idée d’une obligation du passe sanitaire.
Cependant, ces baisses concernant les critères négatifs de l’indice de QV2T n’empêchent pas la détérioration de quelques critères positifs par rapport à septembre : moins de motivation (mais encore à 74%), moins de prise en compte du bien-être par les entreprises (52%) et moins d’accompagnement des managers (50%).Le sens du travail (66%), la satisfaction professionnelle (65%), le plaisir au travail (64%), la cohésion/l’ambiance (64%) et le sentiment de liberté (62%) restent eux à des niveaux comparables à l’étude de septembre, d’où un indice de QV2T stable à 59/100.
Un travail toujours à 2 vitesses, entre ceux qui souffrent et ceux qui s’épanouissent
Pour cette seconde phase d’évaluation de la Qualité de Vie au (Télé)Travail, nous avons choisi d’étudier quelques nouveaux critères révélateurs. Ainsi, ⅓ déclarent se sentir actuellement en situation de surmenage ou de burn-out, 17% reconnaissent avoir déjà eu un épisode dépressif caractérisé, 16% ont rencontré du harcèlement moral, 12% ont fréquemment des idées suicidaires et 7% ont connu du harcèlement sexuel au travail. Il est difficile d’analyser de façon globale toutes ces difficultés qui proviennent de causes variées et de cas individuels. Cela dit, il est à noter que les travailleurs classiques rencontrent moins de problèmes de stress, d’anxiété, de surmenage, de troubles psychologiques ou de burn-out. Les outils numériques réduisent, par exemple, moins leur attention au travail et empiètent moins sur leur vie privée. C’est sans doute un point sur lequel il faut encore travailler pour améliorer les nouvelles pratiques telles que le télétravail, afin d’y voir plus de bénéfices que d’inconvénients.
Cela étant dit, les actifs qui peuvent télétravailler régulièrement ont toujours le meilleur indice QV2T à 64 (identique à septembre). Ceux qui n’ont jamais télétravaillé ont encore un indice inférieur de 7 points en moyenne sur les items positifs étudiés, à savoir la satisfaction professionnelle, la cohésion de l’entreprise, le plaisir, le sentiment de liberté, la prise en compte du bien-être ou encore la rémunération. Parmi ces non-télétravailleurs insatisfaits, on retrouve des profils d’employés, de non-managers des grandes entreprises, du secteur public et logiquement ceux qui envisagent de changer de vie professionnelle. Si le télétravail ne saurait résoudre les difficultés profondes rencontrées par les travailleurs, il peut donc être une part de réponse à certaines insatisfactions.
Davantage d’envies de changement
Plus d’1 actif sur 3 envisage de changer de secteur, de métier ou de poste et 1/4 de créer son entreprise. Aussi, par rapport à septembre, de plus en plus souhaitent partir travailler dans une autre ville (30%) et 19% à l’étranger. Mais les changements désirés sont aussi plus modestes : parmi les ex-télétravailleurs, encore 1 sur 2 souhaiterait y retourner. Et parmi ceux ne l’ayant jamais expérimenté, toujours 15% souhaiteraient pouvoir le faire un jour. Pourtant, seul 1 actif sur 2 serait favorable à la mise en place des 32h (surtout les plus âgés, les CSP- et les salariés du public).
Une nouvelle donnée mérite notre attention : l’attractivité des villes dans lesquelles les actifs se projettent. Bordeaux, Toulouse, Montpellier restent dans le TOP 4 des villes les plus attractives. Nantes baisse et Aix-en-Provence, Marseille et Nice montent fortement. Marseille connaît la plus forte progression (par rapport à 2015), Aix-en-Provence grimpe pour la 1re fois dans nos études sur la 2nde place, détrônant Nantes habituée du haut des classements, qui est reléguée aujourd’hui à la 5e place. Brest, Le Mans et Nancy grimpent également de 3/4 places, tandis que Lille, Angers et Caen régressent dans le classement. Enfin, toutes les autres villes ne bougent pas plus que d’1 ou 2 places.
Cette évaluation de la mi-novembre témoigne d’une meilleure prise en compte de potentielles nouvelles vagues épidémiques mais plus généralement de notre capacité à trouver des alternatives aux modes de travail classiques. Peu à peu, nous nous rendons compte de l’importance de critères souvent invisibles qui participent du bien-être global des travailleurs. Si la situation sanitaire implique de nouveau une diminution des interactions sociales, quels ajustements seront donc apportés aux pratiques de travail choisies ? Pour y répondre, nous vous donnons rendez-vous en janvier pour les résultats de la prochaine évaluation de Qualité de Vie au (Télé)Travail !
Lisez ici l’ensemble du sondage lancé à la mi-novembre et là le communiqué de presse.
Pour retrouver l’analyse du sondage qui s’est déroulé du 21 au 27 septembre ainsi que la biographie des créateurs de l’indice de QV2T, cliquez ici.
(*) Cette base provient de tous les secteurs d’activités, privés comme publics (industrie, BTP, agriculture, commerce, services aux entreprises, services aux particuliers, administrations), et d’entreprises de toute taille (TPE, PME, ETI, GE (Grandes Entreprises > 5000 salariés)). Les personnes ont été interrogées en ligne du 10 au 15 novembre 2021. La représentativité a été déterminée selon la méthode des quotas, grâce aux données 2020 de l’INSEE sur la profession, le sexe, l’âge, la CSP, la taille d’entreprise, le secteur d’activité et la région.